Bordeaux. Mazeppa
On nous télégraphie de Bordeaux.
C’est avec un grand succès, il faut en convenir, que le grand théâtre de Bordeaux a donné, samedi soir, devant une salle splendide composée de tout le high-life bordelais et de quelques princes de la critique parisienne venus exprès pour la première représentation d’un opéra inédit. Mazeppa, de Charles Grandmougin et Georges Hartmann, musique de Mme de Grandval, connue depuis longtemps déjà par un Piccolino joué au Théâtre-Lyrique en 1869, et que créèrent Mme Krauss et Nicolini, et de nombreuses œuvres symphoniques, messes, oratorios exécutés à Paris sur diverses scènes. M. Gravière, directeur du grand théâtre, qui a monté Mazeppa avec un soin très louable, une mise en scène des costumes et des décors superbes, ces derniers dus au pinceau des décorateurs bordelais Artus et Lauriol n’a pas à regretter ces sacrifices, car il a aidé à mettre au jour une belle œuvre dont le succès a dépassé les prévisions.
La partition de Mazeppa s’impose au public par une grande énergie de facture et une coloration très variée et dénote chez son auteur un talent viril empreint de sentiments tendrement féminins.
On est tour à tour charmé par la douceur des motifs et les douces cantilènes de Matréna, l’héroïne de la pièce, et empoigné par les accents farouches de l’Hetman Mazeppa.
L’orchestration, très soignée, très étudiée, indique une éducation artistique, puisée aux meilleures sources. Certains morceaux ont littéralement soulevé la salle et le public bordelais, souvent froid et méfiant aux premières représentations, s’est par moment littéralement emballé.
On a particulièrement applaudi, au premier acte, l’intéressante orchestration accompagnant le récit de Mazeppa, un délicieux fabliau que chante avec un charme exquis Mme Bréjean-Gravière dans le rôle de Matréna.
Au second acte, je signalerai aussi une très jolie et originale chanson de l’Ukraine, absolument, dans la couleur locale, et qui a valu deux rappels à la charmante interprète ; déjà nommée ; une entrée triomphale avec grands effets de cuivres, un ballet et divertissement d’une jolie tournure musicale.
Les honneurs de la soirée ont été pour Mme Bréjean-Graviére, qui s’est bien incarnée dans la poétique figure de l’amante de Mazeppa. Elle a chanté le rôle avec un organe plein de charme et avec grand style. Maurice Devriès interprète en grand artiste le rôle de Mazeppa. Il a été fort applaudi. Je citerai encore l’excellent ténor Dupuy, la basse Silvestre. Haring y a merveilleusement conduit son orchestre et dirigé les répétitions. Très belle mise en scène, bien réglée par Nerval, l’ex-régisseur de la Monnaie.
Le Capitaine Fracasse.
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/Charles GRANDMOUGIN Georges HARTMANN
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publication date : 16/01/25